Castillon, son histoire et les 3 villages

Le 1er Village

 

« Castillon, cette ex-colonie d’écumeurs de mer, d’où l’oreille s’attend toujours à entendre siffler le trait du Maure. Pendu à un roc entre deux vallées, ce village incrusté dans la pierre n’est qu’un prodigieux escarpement de ruelles qu’étreint une ceinture de murailles festonnées de clochetons. On comprend à errer sur ces crêtes que le génois l’ait disputé au sarrasin, que Charles d’Anjou l’ait acheté et un prince de Monaco racheté moyennant quelques centaines de florins d’or stipulés par la Reine Jeanne »

Voici comment Stephen Liegeard, inventeur de la Cote d’Azur, retrace de façon saisissante, le premier site de Castillon, de sa naissance dans la roche à l’édification des murailles médiéval

 

 Les habitants de « Castiglione » puis Castillon ceinturent la forteresse, les collines et les montagnes environnantes de murettes de pierres sèches assemblées les unes aux autres sans chaux, sans mortier et qui permettent siècles après siècles de retenir la terre fertile, favorise l’irrigation et transforment progressivement des pentes inhospitalières en surfaces nourricières.

 

De la peine et du courage, eh bien oui, il en faut à nos ancêtres pour ériger, entretenir, cultiver ces planches dont les vestiges courent encore aujourd’hui dans nos sous-bois.

Leur disparition favorise aujourd’hui l’érosion des sols, et les ruissellements se transforment en torrents dévastateurs dans les vallées.

Comment ne pas ressentir une émotion particulière, en imaginant ces femmes et ces enfants qui transportent des couffins remplis de petites pierres pour consolider l’appui des murets, dont chaque homme maîtrise la science de leur édification.

Les cultures locales sont essentiellement vivrières et sont pratiquées sur l’ensemble du territoire : pomme de terre, haricots, pois chiche, blé, seigle…au même titre que l’élevage des rustiques chèvres et moutons, et plus modestement celui des bovins. Poules et lapins sont élevés afin de compléter l’alimentation.

Il faut beaucoup de sueur, du lever du jour à la nuit tombante, pour enraciner « le pain quotidien ».

La vigne cour en bord de terrasses. Et si les cuvées locales ne sont jamais de grands crus, elles égayent, malgré tout, les repas familiaux.

La fameuse « piquette » fait tourner bien des têtes à l’occasion des Fêtes Patronales de la Saint Julien.

Reprenons le cours de l’histoire de notre village.

En ces périodes de construction de royaumes et seigneuries, Castillon devient tour à tour, possession des Comtes de Vintimiglia, puis des Consuls Vento et des Seigneurs de Sospel.

Au 12ème siècle, Castillon est cédé aux Génois.

Afin de lutter contre l’influence de Gênes, une coalition, dont Castillon est prenante, se rapproche des seuls seigneurs aptes à lutter contre l’emprise de la citée ligure : les Comtes de Provence.

S’ensuit une période de désordres. En ces temps troublés par les luttes d’influence, le village devient en 1348 propriété de la Principauté de Monaco, avant de retourner sous la protection de Sospel, la « grande sœur », en 1376.

En ce milieu du 14ème siècle, la Grande Peste sévit avec plus de 20 millions de morts.

Castillon n’est pas épargné, malgré le confinement qui s’avère déjà à l’époque le moyen le plus efficace pour lutter contre la propagation de ce bacille.

Il convient de souligner les liens historiques entre Sospel et Castillon, ce dernier, par sa situation clé, était un élément efficace de défense du bassin Sospellois qui offre lui-même, aux villages environnants, de multiples services : marchés agricoles, commerces de bétail, et autres. Les moulins, les huileries, attirent au-delà de la viguerie.

Col de Garde (ancien nom du Col de Castillon), Plateau de Ségra, Col de Braus : Autant de lieux, de passages obligés sur la fameuse route du sel qui relie les salins d’Hyères dans le Var, aux plaines du Piémont et du nord de l’Italie, en passant par Sospel, Breil et Tende pour rejoindre Cuneo et le nord de l’Italie.

Remarquons qu’en ces siècles, le regard de Castillon est tourné vers l’intérieur des terres. Promesse de richesses, la mer est regardée de haut et de loin, car elle est source de dangers.

Quant à la Vallée du Carei, encaissée, couverte de forêts et se terminant dans les marais du bord de mer, elle n’invite nullement à s’y aventurer.

Le 28 septembre de l’an 1388 à Nice, est signé sur le parvis de l’Abbaye de Saint Pons, « l’Acte de Dédition » de Nice à la Maison de Savoie, par lequel le Comte Amédée VII de Savoie s’engage à gouverner et protéger Nice et sa Viguerie. Ainsi, Castillon va partager le destin des Comtes, qui vont prendre le titre de Ducs de Savoie puis de Rois de Sardaigne

Durant 2 siècles, les guerres sont incessantes.

 

La paix signée à Aix-la-Chapelle, en 1748, met enfin un terme aux hostilités. Castillon et le Comté de Nice passent sous l’administration du Royaume Sarde.

Après ces ravages, 40 années de paix favorisent la reprise du commerce, de l’agriculture et la construction d’infrastructures tels que les chemins muletiers, les canaux d’irrigation et les voies commerciales.

L’essor économique est alors important.

Castillon recense 250 habitants, alors que Sospel en totalise 6 000, soit une population égale à la moitié de celle de Nice !

C’est en 1796, lors de la signature du Traité de Paris, que Castillon redevient français sous l’impulsion du Consul Bonaparte.

Castillon, qui compte 314 habitants en 1799, est intégré à l’arrondissement de Monaco.

Les armées napoléoniennes ont besoin d’hommes, et le service militaire devient obligatoire.

Des castillonnais partent ainsi combattre aux 4 coins de l’Europe. 3 castillonnais laissent leur nom et leur vie pour un dessein qui les dépasse :

FAlbin Joseph

FArbel Pierre

FDellerba Charles

S’ouvre ensuite une période de stabilité où l’agriculture, le commerce, les infrastructures se développent, même si la guerre de 1870 oblige les jeunes hommes à se plier aux obligations militaires et à intégrer, pour certains, la Garde Nationale Mobile.

Le 23 février 1887 aux alentours de 5h30, des tremblements se font ressentir, s’ensuit une série de quatre secousses destructrices de 6h20 à 8h50. Les Castillonnais sidérés, quittent leurs maisons en hâte.

Les habitations sont ébranlées, ainsi que les bâtiments publics et l’Eglise.

Le Département compte 8 victimes, avec des dégâts matériels importants, mais nos voisins ligures déplorent la perte de 640 personnes. En effet, l’épicentre du séisme se situe en mer, au large de la Ligurie et d’Imperia.

A Castillon la désolation est totale. Deux enfants sont tués et il ne reste que des amas de pierres, de poutrelles et de gravats, des amoncellements de meubles et d’objets divers qui obstruent les rues méconnaissables.

Courageusement les Castillonnais se mettent à déblayer, nettoyer, à consolider, et s’il le faut, détruire ce qui risque encore de s’affaisser.

Mais le village de Castillon est à terre, définitivement vaincu.

Les habitants décident de le reconstruire, quelques mètres plus bas, au lieu-dit « les Colles ». Ce sera Castillon le deuxième village.

Un pan de l’épaisse muraille médiévale, quelques restes de fondations, un majestueux escalier qui traversait le village « Tralatour » et menait à l’Eglise, une croix, solidement ancrée dans la roche veillent désormais sur les restes du village.

Le 2ème Village

 

Le 2ème village, construit avec énergie, naît donc à la charnière du 19ème et du 20ème siècle.

La vie reste rythmée par le cycle des saisons, le mouvement de la terre et des astres, le 20ème siècle n’apporte pas une terre plus riche, ni une eau plus abondante.

L’eau est un bien précieux et son captage, son transport, la lutte contre les épisodes de sécheresse sont autant de défis. De nombreuses sources et points d’eau, mais inégalement répartis, aux débits capricieux, doivent néanmoins répondre à la consommation des habitants, abreuver le bétail et irriguer les cultures sur des lieux parfois éloignés et accidentés.

Peu de pluies, mais un brouillard fréquent participe à l’humidification de l’air et des sols. D’ailleurs, à l’occasion de la Fête Patronale de la Saint Julien, le Saint Patron est invoqué pour favoriser les pluies.

Aucune habitation du 2ème village ne dispose de l’eau courante ; c’est aux trois fontaines du village que les habitants vont journellement s’alimenter.

Avec son lavoir attenant, celle qui se trouve au fond de la grande esplanade, connut moult péripéties et a, récemment, pleinement réintégré le patrimoine communal.

Le village compte plusieurs fours à pain, ainsi qu’un four communal où les familles viennent cuire leur pain.

Le « confort moderne » prend date à Castillon avec l’arrivée de l’électricité en 1908, d’abord dans les rues et places publiques, puis peu à peu chez les particuliers.

Le village est pourvu de services (Mairie, Poste, École…) et de rares commerces.

L’essentiel provient de l’extérieur, grâce aux fréquents passages des marchands ambulants ou de commerçants venus de Sospel.

En 1912, la ligne de tram, reliant Menton à Sospel, est ouverte et dessert Castillon.

Après seulement 19 années d’exploitation, et malgré des investissements très lourds pour l’époque, elle ne survit pas à la concurrence de la ligne de chemin de fer Nice-Cuneo, ni à celle du transport automobile et ferme définitivement le 23 mars 1931.

Cette ligne, ponctuée de nombreux ouvrages d’arts, nous a légué le magnifique Viaduc du Caramel, son petit frère du Quiarel, ainsi que l’imposante Gare de Castillon située à l’entrée du tunnel que nous empruntons aujourd’hui pour nous rendre à Sospel.

En août 1914, la 1ère Guerre Mondiale éclate et les jeunes Castillonnais sont mobilisés.

Douze d’entre eux ne reverrons jamais Castillon, qui comme tant de villes et villages est saigné au cœur.

Un Castillonnais repose enfoui dans la glaise du Chemin des Dames, à Craonne dans l’Aisne. Un autre périt sous les obus au hameau de la Neuville, près de Berry-Au-Bac. Un autre, laisse sa vie au milieu du détroit des Dardanelles, quand le sous-marin « Le Joule » sombre, touché par une mine flottante. D’autres périssent par les gaz et sous la mitraille.

Ceux qui reviennent, portent à jamais les stigmates de ces années d’épreuves, de souffrances et d’injustice. Ils en sont si marqués que beaucoup refusent même d’évoquer cette terrible tragédie.

La vie reprend, dans notre petit village de Castillon et le cimetière témoigne encore, par un modeste mais émouvant monument, du sacrifice de cette jeunesse.

La période des années 20 voit se développer le tourisme. Les bains de mer attirent les riches anglais, russes, scandinaves qui se tournent aussi vers l’arrière-pays, les plaisirs de plein air et de la montagne.

Castillon témoigne de cette période, avec les deux hôtels-restaurants situés à l’entrée du tunnel du Col où les voyageurs font halte. Ainsi « l’Hôtel-Restaurant des Etrangers » apparaît sur bien des photos et cartes postales.

Il faut bien panser les plaies de la Grande Guerre. Et s’il est un événement qui chaque année, de 1903 à nos jours, attire les foules insouciantes et enthousiastes au bord des routes, c’est bien le Tour de France.

Le premier passage, en pleine nuit, du Col de Castillon avait eu lieu le 14 juillet 1911, avant la « Grande Guerre » lors d’une étape Nice-Marseille longue de 334 Km.

Mais c’est nombreux et en pleine lumière, que les Castillonnais assistent au renouveau du Tour en 1920 et 1921.

 

Si aujourd’hui encore de nombreux champions font du Col un terrain d’entraînement, René Vieto restera le « Prince du Castillon et du Braus », au sommet duquel ses cendres ont été dispersées en 1988, en souvenir.

Nos anciens auraient bien du mal aujourd’hui à reconnaître leurs campagnes et leurs quartiers, recouverts d’une épaisse végétation, ou ayant fait l’objet d’urbanisation même si celle-ci est restée raisonnable sur notre commune.

En se promenant tout autour du village, nous pouvons voir croître  cerisiers, figuiers, ceps de vignes, oliviers, comme autant de témoignages vivants du passé agrumicole de la Commune.

A cet instant du récit, il nous faut rendre un hommage mérité à Jean Raybaut, félibre Castillonnais, qui sait parler avec tendresse et poésie de notre village, des gens et de la nature, et qui a su fixer aussi des règles lexicales et grammaticales du « Castilhounenc ».

Cette belle langue d’oc de tradition orale, qui n’est plus aujourd’hui pratiquée, mais qui nous survivra à tous grâce à cet incomparable conteur.

Travail de rigueur et de passion, le « Panlar Castilhounénc », lexique Français-Castillonnais publié en 1998, mais aussi « Les chroniques de la vie quotidienne », le très beau livre « Tempe fa », les très nombreux articles parus ou paraissant dans Nice Matin et « Ou Païs Mentounasc » sont autant de lettres d’amour à notre village, ses habitants, ses terres.

Par ses récits, Jean Raybaut sait restituer toutes la tendresse des hommes, des plantes, des arbres, des animaux et des lieux. Castillon en devient alors plus beau. Merci Monsieur RAYBAUT.

A partir de la fin des années 20 et jusqu’au milieu des années 30, notre commune se couvre d’ouvrages militaires dans la continuité de la ligne Maginot, venant compléter les ouvrages déjà existants dont les plus significatifs sont le fortin situé au sommet du Mont Ours, ainsi que la batterie de Siricocca, à l’allure de solide bergerie, qui reprendra d’ailleurs sa pacifique destinée après sa démilitarisation.

Pièce importante du dispositif de défense des Alpes du sud, le Fort de Castillon fut mis en chantier en 1930 et achevé quelques années plus tard. C’est le rocher sur lequel s’érige le Premier Village qui est choisi et sert de base à cette imposante construction.

Armé de cinq blocs de combats, l’ouvrage participe activement aux évènements de juin 1940 et précipite la destruction du second village.

L’effervescence liée à la construction des ouvrages, le passage et le cantonnement fréquent des troupes alpines sur la commune, apportent une certaine activité au commerce local et un embryon de prospérité aux habitants qui vendent leurs produits, mais achètent ou échangent aussi en retour diverses denrées.

La France, l’Europe et le Monde vont entrer une nouvelle fois dans la tourmente. Castillon qui vient à peine de se reconstruire va connaître une nouvelle fois le malheur.

Le 3 septembre 1939, la France déclare la guerre à l’Allemagne.

Le 22 juin 1940, les troupes italiennes attaquent en masse sur les zones frontières et le secteur de Castillon va être l’un de ces théâtres d’opérations.

Deux divisions, formées de troupes régulières et de « chemises noires », lancent leurs fantassins à l’assaut des positions françaises. Dans ce dispositif, les ouvrages de Pierre Pointue, du Razet et de Scuvion jouent un grand rôle parvenant à contenir, puis à repousser les assaillants.

Pendant plusieurs jours, marqués par d’épais brouillards et parfois de pluies intenses, de furieux combats ont lieu sur la ligne frontière.

Les avant-postes de Castillon résistent à la pression ennemie.

L’Armistice, entre la France et l’Italie, met fin aux hostilités. Les habitants de Castillon reviennent au village, coexistent avec les forces italiennes d’occupation, et se tournent encore une fois avec acharnement vers leur terre nourricière pour survivre.

Peu après Castillon et la Zone Sud de la France sont envahis par les troupes allemandes en septembre 43

Comme sur l’ensemble du territoire occupé, la résistance s’organise autour de Castellar, de Castillon, de Braus et de l’Authion. Le groupe qui va jouer un grand rôle dans la libération de notre secteur, aux côtés des forces alliées, est composé de 26 sospellois, 8 castillonnais et 2 moulinois.

Le 8 septembre 1944, Monaco, Roquebrune, et Menton sont enfin libérés. Mais sur les hauteurs les combats continuent, et s’intensifient, notamment autour du Mont Ours et de Castillon. L’engagement des forces alliées, Américains et Canadiens, qui composent le First Spécial Service Force est total.

Les Allemands, retranchés, repoussent les éléments alliés qui sont parvenus dans les rues du village.

De violents combats se déroulent et les alliés sont contraints de se retirer des abords du Fort, du Village et des avant-postes.

Devant l’impuissance des forces terrestres à se rendre maîtresses de Castillon et de sa forteresse, le Commandement allié estime que seule l’artillerie de marine est apte à débloquer la situation. Cette décision scelle le sort du village, qui va périr sous un orage de feu et d’acier !

Les navires alliés dont le cuirassé français « Le Lorraine » pilonnent Castillon.

De mi-septembre à mi-octobre 1944, sous un déluge d’obus, Castillon se trouve ainsi en première ligne de la bataille de libération de Sospel, et des vallées de la Bévéra et de la Roya.

Des dizaines de Castillonnais qui restaient encore sur le village sont une nouvelle fois évacués vers Menton, alors que d’autres se réfugient dans les campagnes alentours, dans des grottes où ils subissent de nombreux mitraillages.

Le 15 octobre, des patrouilles canadiennes et américaines dépassent Castillon et parviennent à Sospel. Devant les pertes subies et la pression exercée, les Allemands se retirent en direction de Sospel en ayant au préalable saboté les installations du Fort.

Le 25 octobre, les Canadiens élargissent leur implantation tout autour de Castillon qui n’est plus qu’un amas de ruines.

Pour la 2ème fois Castillon est terrassé.

Le 28 octobre 44, sous la pression des Forces Alliées, les Allemands quittent Sospel, alors que les combats se poursuivent dans toute la vallée de la Roya qui ne sera totalement libérée qu’en avril 1945.

Le 8 mai 1945, l’Allemagne capitule. La paix est de retour.

Mais, pour les Castillonnais, la liesse se mêle au désespoir. Le village est dévasté, pas un édifice n’a résisté. Comme un symbole, seule l’église dispose encore de ses 4 murs. C’est un nouvelle fois le temps des larmes pour les Castillonnais, une nouvelle fois contraints de tout reconstruire, de repartir à zéro.

Le 3ème Village

La résilience toujours de ces villageois qui, la paix retrouvée, ont une nouvelle fois tout perdu.

Le constat est terrible. Au recensement de 1946, il ne reste plus que 37 habitants sur la commune.

Le site du Col, périmètre militaire, devient inconstructible. Le Village est rasé !

 

C’est 3 kilomètres plus bas en direction de Menton, à 535 mètres d’altitude que sera reconstruit Castillon, le 3éme du nom, au titre des dommages de Guerre.

La construction de Castillon-le-neuf, le bien nommé, débute en 1951.

22 octobre 1951 : le nouveau village de Castillon, construit en style néo-provencal et dont l’architecte est M. Richard Laugier rendu célèbre par la construction du Palais des Exposition à Nice, est inauguré.

La ville de Beausoleil et la Société des Bains de Mer de Monaco, participent notablement au financement de la reconstruction du village.

Le nom des rues et passages évoquent les événements et personnages liés aux événements récents (Libération, Charles De Gaulle, République, passage des Alliés).

Quant au Passage Solférino, il existait déjà dans l’ancien village.

Saint-Julien, Patron du village, donne son nom à l’Eglise érigée en 1952 à l’entrée du village, où sont conservés notamment des éléments de mobilier et de culte ayant échappé aux destructions.

Saint-Julien donne aussi son nom à l’une des places de ce 3ème village.

A quelques pas de l’Eglise, le four à pain évoque par sa forme extérieure, la chapelle des Pénitents Blancs qui existait dans l’ancien village.

Les constructions en pierre apparentes représentent un investissement conséquent, mais rien ne peut faire revivre complètement l’âme villageoise perdue sous les bombardements.

Chaque année au plus près du 13 septembre, a lieu la Fête Patronale de Saint-Julien.

Cérémonies religieuses et officielles, bals, attractions diverses mettent une joyeuse animation et les villageois en procession, serpentent par la rue principale pour se rendre sur la place Saint-Julien. Et là, le Curé venu de Sospel ou de Menton, bénit l’ensemble de la Commune et de ses habitants.

Parfois les processions se rendent au bout du chemin de Saint-Antonin où se trouvait une petite chapelle malheureusement détruite il n’y a pas si longtemps. Ne subsiste plus, de cet emblématique édifice religieux, que son linteau, gisant, comme abandonné.

Les anciens se sont longtemps souvenus que 3 fois l’an, les habitants du 2ème village se rendaient à la chapelle de Saint-Antonin, en passant par les quartiers Crotta, Carapes et Laval pour un office religieux.

Si la descente se faisait aisément et en bon ordre, il n’en était pas de même après la messe et le casse-croûte pris sur place, pour remonter et regagner le Village.

La petite chapelle situé quartier Saint-Louis Streuss, toujours existante, complète l’ensemble des édifices religieux de la commune.

Les efforts sont nombreux de la part des élus et des habitants afin de donner vie, entretenir ce nouveau village, y rendre la vie agréable.

Eau, assainissement, bâtiments communaux, chemins et sentiers engloutissent les maigres recettes d’une population permanente qui peine à progresser.

  • 1962 : 82 habitants
  • 1975 : 55 habitants; l’école n’est plus qu’un lointain souvenir, pratiquement plus un enfant n’est recensé sur la commune. . .

La période estivale draine beaucoup de monde et la diaspora castillonnaise aime à se retrouver au village. Que de parties de pétanques, de soirées entières à parler assis sur les bancs.

A cette époque se mélangent encore joyeusement les langues française et castillonnaise « lou panlàr Castilhounénc », et les quelques « estrangers » présents au village se sentant dès lors un peu exclus des conversations. . .

Mais le mal était terrible.

A cet exode lié à la destruction du village à peine 25 ans plus tôt, s’ajoute l’exode rural au bénéfice des villes du littoral toutes proches et plus attractives.

Les bassins d’emploi de Menton et du littoral et une nouvelle façon de vivre, vident les villages de leurs forces vives : Castillon n’échappe pas à la règle ! La route reliant Menton à Castillon et à Sospel est jugée trop sinueuse, trop longue, trop dangereuse.

 

Les activités économiques situées sur la commune sont réduites et le petit commerce est anéanti.

L’exploitation des carrières de Laval et du Caramel, un temps ressource principale des finances communales, est abandonnée.

Une champignonnière située peu avant le quartier Boucarte flirtant avec le lit du Carei ne survit pas, de même qu’une briquèterie installée sur l’esplanade du col.

De ce fait, les bras valides disparaissent, et les familles et les fêtes aussi.

S’il fait malgré tout bon vivre à Castillon, au moment de vacances estivales, la survie du village et de la communauté est une nouvelle fois en jeu.

La presse locale, Nice-Matin, consacre plusieurs articles à cette situation.

Le quotidien, en son édition du 1er septembre 1975, titre :

« Après seulement 25 années d’existence, Castillon-le-neuf meurt d’inanition derrière son beau décor en trompe l’œil ».

« Nous ne sommes plus que 55 habitants, dont 36 au village et la moyenne d’âge est de 70ans ; depuis 1968 le village a perdu 43% de sa population et les finances qui en découlent » déclare le Maire.

« Le village est vide et pourtant il est impossible de trouver à s’y loger, les résidences secondaires constituent l’essentiel du parc immobilier et elles ne sont occupées que 2 mois l’an » constate le 1er Adjoint.

Pas de Secrétaire de Mairie, plus de cantonnier, le Maire, son Adjoint et une poignée de leurs collègues assument bénévolement toutes les tâches

Un dernier souci accable les édiles locaux : la perspective de construction de la future pénétrante routière Menton-Sospel, qui aurait pour conséquence d’isoler définitivement le village.

Pour faire bonne mesure citons encore la presse locale qui titre et interroge le 18 décembre 1977 :

« Castillon village entièrement reconstruit mourra-t-il pour la 3ème fois ? »

« Derrière les persiennes vertes à peine ouvertes sur le jour, on sent le poids des regards que l’on ne croise pas. On sent la révolte, le désespoir et chez certains, la résignation… »

Mais c’est sans compter sur la capacité de résilience de ce petit village qui résiste encore et toujours…

 

En 1983, sous l’impulsion de l’emblématique Maire Lucien Rousset et de son Adjoint Justin Barroi, naît le projet « Castillon Renouveau ». S’ensuivent des années d’efforts et d’imagination de la part de ces élus.

Le 18 septembre 1988, « Les Résidences des Arcades du Serre » sont inaugurées en grandes pompes à la période symbolique où se célèbre la Saint-Julien, Patron du Village. Cette réalisation est composée de :

  • 25 logements (à usage locatif et en accession à la propriété)
  • Des locaux destinés au commerce, à l’artisanat et à l’art,
  • Une nouvelle Mairie
  • Une salle d’exposition

 

Castillon resplendit au soleil de septembre.

Les galeries d’artistes ouvrent, et si tout n’est pas rose, ni facile, des commerces reprennent place.

 

L’école réouvre quelques années plus tard et permet à des dizaines de jeunes castillonnais d’y faire leurs premières classes.

Il est remarquable et réconfortant de constater combien les jeunes gens aujourd’hui adultes se souviennent avec nostalgie de leur apprentissage à l’école de Castillon, de ce qu’ils y apprirent et des liens indéfectibles qu’ils surent y nouer.

Le pari est pour un temps gagné.

  • 2005 : 324 habitants
  • 2020 : 416 habitants

Durant les 30 dernières années, plusieurs équipes municipales vont se succéder, donnant un sens à leurs actions, afin que Castillon vive et se développe.

Le canton de Sospel n’existe plus ; Castillon appartient désormais au Canton de Menton.

L’intercommunalité et les regroupements de communes, les métropoles sont le nouveau crédo politique.

Le transfert des compétences rythme les ordres du jour des divers conseils.

Force est de constater que les moyens, notamment financiers, consacrés au moindre projet, dépassent les capacités de chacun ; la mutualisation devient alors la règle.

Ainsi, il y a 20 ans, la Communauté d’Agglomération de la Riviera Française est créée.

Castillon en est membre depuis le 27 septembre 2001 et partage désormais son avenir avec 14 autres communes.

Plus de 30 ans après leur inauguration, les galeries sont toujours occupées par des artistes et artisans d’art qui font la notoriété et l’attractivité du village. La visite des Galeries dont certaines abritent de nouveaux artistes, incite à la déambulation. Nous pouvons admirer quelques-unes de leurs plus belles réalisations

 

Il est toujours difficile de se loger à Castillon, non plus parce que les résidences secondaires y sont trop nombreuses, mais parce que les logements existants sont largement occupés.

Encadré par des lois et règlements plus astreignants que par le passé, l’urbanisme se développe raisonnablement dans les quartiers périphériques.

La route Menton-Sospel et la pénétrante donnent quelque peu tort aux élus d’un temps ; le village ne se trouve pas isolé et s’il est un art qui s’y développe, c’est bien celui de s’y garer !

Les bassins d’emplois de Menton et surtout de Monaco vers lesquels Castillon mais aussi le bassin de Sospel sont tournés permettent à nombre d’actifs et de familles de se fixer désormais sur la commune. La distance fait moins peur de nos jours

Si l’école publique a dû malheureusement fermer à nouveau ses portes, une initiative privée éducative participe à redonner de la vie au village. Les perspectives de développement de « La Passerelle des Pitchouns » sont réjouissantes pour l’avenir.

Solidaire du sort des sinistrés de la Roya, la commune a su nouer les partenariats nécessaires autour de projets économiques, solidaires et humains.

L’installation de la ferme itinérante Educ Ferme Loisirs, en toute proximité du village, redonne sens à notre territoire rural.

L’ouverture de la Maison de Pays le « Terro’art » renforce les liens profonds et étroits liés avec l’Institution le Prieuré, qui exploite déjà sur le village le restaurant l’Hartmonie labellisé « Bistrot de pays ».

 

L’agriculture responsable, la permaculture sont autant d’opportunités pour notre commune afin que renaisse cette activité ancestrale.

Si les terrains exploités par le Mirazur donnent quelques titres de noblesse à l’agriculture locale, il faut saluer les divers exploitants qui n’hésitent pas à valoriser les terres de Castillon, pour certains depuis des décennies.

 

De nouveaux besoins naissent et peuvent nourrir de nouveaux projets, les activités de plein air doivent trouver sur notre commune une résonnance digne de la nature qui nous entoure.

Le site d’escalade est ainsi mondialement réputé ; les sentiers et chemins qui serpentent sur la commune sont une véritable ressource.

Melvin, un jeune champion moto, assure aussi la notoriété sportive de Castillon

 

De la mer au Massif des Merveilles et du Mercantour, il n’y a qu’un pas et il passe aussi par Castillon !

70 ans, c’est bien jeune pour ce nouveau village dont nous venons de survoler rapidement plusieurs siècles de vie.

Histoire faites de joies et de peines, de douleurs et d’insouciance.

 

Histoire de femmes et d’hommes de Castillon qui ont aussi rencontré l’Histoire, celle que l’on écrit avec un grand « H ».

 

Nous avons vu passer bien des générations, nous avons assisté à la transformation de notre commune, nous y avons vu les paysages et les villages bouleversés, à ne plus les reconnaître.

 

Mais il est un patrimoine immatériel, qui s’attache à notre « pays », qui est un bien inaliénable car il témoigne de l’identité du territoire.

 

Ce patrimoine se sont les 70 quartiers qui structurent la commune depuis des siècles, 70 quartiers cadastrés comme autant d’années de Castillon que nous fêtons en 2021.

 

Ces quartiers sont les gènes de la Commune, ils sont toujours bien vivants, ont toujours les mêmes noms, même si parfois l’Administration les ont malencontreusement « francisés » et certains actes notariés abominablement estropiés.

Ces noms donnés par nos ancêtres afin de nommer un lieu précis, que nul ne contestait, que tous savaient situer sans erreur.

Tous ces noms de lieux racontent une histoire : ici une source, là une forêt, là-bas un chemin, plus loin un vallon significatif…

 

Ils sont les passeurs de mémoire,

Ils chantent la commune…

Foun d’al Càlpre, Biatounéa, Bail, San Touan, Fountanin, Terrouns, Rémégouns, Castagnera, Sant Antounin, Loura….

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